hantent Montréal
leurs orbites vides ne voient rien ni personne
ni les arc-en ciels
il y a des destins plus tristes que la mort
des vies sans enfance
à se dessécher en grognant comme un porc
sérieux comme un paon
il y a dans les rues des moteurs qui s’emballent
des poumons brûlés
des pas qui s’égarent dans toutes les gares
des rêves brisés
c’est dur de vieillir fidèle à son enfance
au fil des saisons
il y a trop de morts qui détestent la vie
et qui se croient vivants
tu veux qu’on en parle
pouliche
veux-tu qu’on en parle?
on en parlera
longtemps
depuis notre enfance on nous parle d’amour
et de liberté
depuis qu’on caracole on nous chasse au lasso
pour nous attacher
libres de nos corps et libres de nos âmes
et de nos amours
nous nous caressons du bout de la crinière
ou du bout des yeux
galopons dans le vent et tous ceux qui s’enchaînent
nous pointent du doigt
les gens qui calculent n’aiment pas ceux qui aiment
sans rien demander
nous ce sont nos corps et nos âmes qui parlent
bien plus que nos mots
et tant pis pour ceux qui ont peur de la vie
et de la liberté
tu veux qu’on en parle
pouliche
veux-tu qu’on en parle?
on en parlera
longtemps
on entend souvent s’emballer la rumeur
de la fin du monde
pourtant plus au nord le printemps refleurit
et la terre est ronde
il reste là-bas des prés multicolores
des enfants qui dansent
et peut-être un lieu où nous pourrions courir
ivres de plaisir
un reste d’espoir un soupçon de silence
dans le grand chaos
une page blanche à remplir de couleurs
sous un arc-en-ciel
parce que la mort viendra bien assez vite
nous restons debout
armées d’invention de rêve et de folie
et toujours unies
tu veux qu’on en parle
pouliche
veux-tu qu’on en parle?
on en parlera
longtemps.
© Pascale Cormier, décembre 2015